Vous connaissez le slogan du gouvernement : « La seule solution, c’est la vaccination ». Il est intrigant. Il est fictionnel. La fiction ne se restreint pas à alimenter l’imaginaire, elle alimente aussi le réel. Si notre monde gère une épidémie comme dans un mauvais film de science-fiction et en alignement avec des dystopies, c’est que la pensée déteste être prise au dépourvue et se raccroche toujours à ce qui existe, quand bien même ce qui existe ne sont que de vieilles fictions. A ce point que le Ministère Français des armées a lancé une « Red Team » avec pour mission « d’imaginer et de créer des scénarios futuristes et disruptifs au profit de l’innovation de défense. » Ceci n’est pas une plaisanterie, il vous suffit de suivre le lien sous « Red Team » pour voir que vous arrivez bien sur un site du gouvernement. France culture y a consacré une émission en avril dernier.
Les récits de catastrophes ont tous des schémas similaires : peu de gens savent que la catastrophe va arriver et il est nécessaire de garder le secret pour éviter la panique. Ce schéma fonctionne avec les vagues géantes, les monstres géants, les astéroïdes géants, les avions qui vont s’écraser, les contagions, les zombies… C’est le schéma qu’on retrouvait aussi dans la réalité jusqu’à une date assez récente avec tout type de catastrophe : les catastrophes nucléaires (Three Mile Island en 1979, Tchernobyl 1986, Fukushima 2011), les maladies (le VIH fortement minimisé pendant près d’une décennie, mais la grippe également) et même le terrorisme. Après les attentas du Bataclan, aucun ministre n’est venu annoncer qu’il fallait avoir peur et rester terré chez soi. Au contraire François Hollande a déclaré juste après : « Ne cédons pas aux tentations de repli, ne cédons pas non plus à la peur, aux excès et à la surenchère“. Pourtant pendant les trois ans qui ont suivi il y a eu 51 attentats déjoués. Mais, voilà on avait décidé de nous rassurer plutôt que de nous faire peur, selon une doctrine naturelle de paternalisme bienveillant. Vous n’avez d’ailleurs jamais de consignes de sécurité dans un avion, un hôtel ou un bateau, qui vous disent : « en cas de feu, criez et paniquez, ça ira mieux. ». On vous demande de garder votre calme. Vous faites de même spontanément si un ami a un souci, même grave, vous ne sonnez pas le tocsin. Les années avaient donc forgé le proverbe de sagesse populaire “La peur est mauvaise conseillère”.
Pourtant les gouvernements ont terrorisé les populations pour le covid, prenant à revers les scénarios de fiction et la réalité antérieure. Il faut écarter tout de suite que ce serait une conséquence directe d’une surévaluation de la gravité de la maladie par les experts-conseillers. Il n’y a pas de lien direct entre le « choix de la peur » et sa perception par les experts : le danger d’une contagion radioactive par le nuage de Tchernobyl était très bien connu en 1986 et il a pourtant été décidé de le cacher. Pourquoi aujourd’hui les gouvernements ont-ils choisi de changer de paradigme et de terroriser les populations ? Dans un autre article nous expliquons la mécanique du “désir de pandémie” (relevé par le Sénat lui-même en 2010) qui participe à ce mouvement. Mais ici nous allons nous concentrer sur le pouvoir et le Pouvoir. Ils ont terrorisé les populations parce qu’ils en avaient le pouvoir et parce que ce pouvoir en tant que capacité a agir était bon pour le Pouvoir en tant que domination égotiste du monde.
Depuis toujours, on peut créer la peur pour asservir mais c’est un courant de pensée récent qui souhaite créer des bons comportements par la peur : comme des pubs chocs de la sécurité routière (dès 2001 mais plutôt à partir de 2007), ou des paquets de cigarettes couverts d’horreurs en images à partir de 2010. Ceci est en rupture avec des incitations antérieures qui étaient dans un tout autre registre : « tu t’es vu quand t’as bu » ou « Oui blagueur, non fumeur ». Cette approche directe par la peur est un peu brutale et n’a pas trouvé beaucoup d’écho en France hormis les deux exemples que nous venons de donner. Par contre de manière moins brutale, les sciences comportementales à destinations des gouvernements se sont mieux dotées à partir de 2008. Il est né une réflexion sur la manière d’orienter les comportements des administrés et dont vous avez de plus en plus souvent entendu parler sous le nom de « nudge ». Le livre qui a proposé le concept n’avait pas caché son intention puisqu’il vise expressément les politiques de la santé : Nudge: Improving Decisions About Health, Wealth, and Happiness. L’auteur explique que le nudge est « un artifice qui, dans la proposition d’un choix, vise à orienter le comportement des gens dans une direction prévisible sans interdire certaines options ni donner de l’argent ». Le plus basique consiste à cocher par défaut le choix que vous voulez que l’administré choisisse. On en retrouve partout aujourd’hui y compris dans votre déclaration d’impôt, à la SNCF, et, le gouvernement français a même une unité qui travaille sur ce sujet depuis 2013 (Lire ou écoutez sur France culture). A partir du moment où on a accepté l’idée que l’Etat pouvait chercher à orienter les comportements des citoyens sans que le citoyen soit conscient du biais cognitif qu’on lui inflige, on a ouvert la boite de Pandore. On avait ouvert le permis de manipuler.
On va prendre l’exemple du Royaume Uni qui n’a pas caché son utilisation de la psychologie dans cette crise selon des éléments du Telegraph. Au Royaume-Uni, le SPI-B est l’équivalent du conseil scientifique français, avec moins de biais et d’influence toutefois car il préexistait à la crise pour travailler sur la grippe. En Mars 2020, il publie une note pour améliorer le respect des distances sociales. Cette note indique “Un nombre important de personnes ne se sentent pas encore assez menacées à titre personnel. Elles pourraient être rassurées par le faible taux de mortalité de leur catégorie démographique, bien que leur niveau d’intérêt puisse monter. […] La perception d’une menace personnelle a besoin d’être augmentée parmi ceux qui sont complaisants, en utilisant des messages émotionnels très intenses. ». Une journaliste nommée Laura Dodsworth a fait un livre paru le 17 mai sur le sujet et a été interviewer les membres du SPI-B en début 2021 : nombreux sont les membres de ce conseil scientifique qui ont constaté cette dérive d’une utilisation manipulatoire de la peur. Le Telegraph cite plusieurs extraits de ces interviews comme « “Utiliser la peur comme un moyen de contrôle n’est pas éthique. Utiliser la peur rappelle le totalitarisme. Ce n’est pas une posture éthique pour un gouvernement moderne”, « Il y a eu des discussions sur le besoin d’encourager la conformité, et des décisions étaient prises pour faire progresser la peur. La façon dont nous avons utilisé la peur était dystopique », « Vous pouvez appelez ça ‘contrôle de l’esprit’, c’est ce que nous faisons », « les psychologues ne voyaient pas qu’ils avaient cessés d’être altruistes pour devenir manipulateurs. Ils ont trop de pouvoir et cela les a intoxiqués ».
Nous ne voyons pas ce qu’il y a de différent entre la France et le Royaume Uni dans cette gestion manipulatoire de la peur. Il manque juste un journaliste français pour obtenir de telles confidences. Elles viendront un jour, non pas parce que quelqu’un se sentira éthiquement devant l’obligation de le faire, mais parce qu’en politique et dans tous les groupes humains quelqu’un finit toujours par trahir son camp pour quelque pouvoir de plus. En attendant nous avons en France légèrement quitté le domaine de la peur pour retourner dans le nudge pur. Ce nudge par excellence c’est le pass sanitaire. C’est la boite de Pandore dans la boite de Pandore puisque le permis de manipuler donne accès au permis de discriminer les citoyens. Nous sommes bien dans un choix construit, une architecture de choix. Car le pass sanitaire vous offre trois choix : vous tester, vous vacciner, avoir eu le covid. Le troisième choix n’est pas un choix, puisque vous n’êtes pas libre d’avoir été contaminé ou de l’être. Il reste donc uniquement deux choix. Sachant que le slogan du gouvernement est « La seule solution, c’est la vaccination », votre choix se réduit à un seul. En effet, s’il n’y a qu’une seule solution, pourquoi voudriez-vous délibérément la refuser ? Autant accepter au plus vite cette solution qui est unique. Le choix de vous tester demeure possible mais il est celui du mauvais citoyen qui refuse la seule solution. Cette option n’existe que pour mettre en lumière le fait que l’on vous laisse un choix. C’est cette mauvaise fois caractérisée qui fait la différence entre l’incitation acceptable que doit mettre en place un gouvernement pour favoriser certains choix, par rapport à une manipulation.
La manipulation à ce titre va encore un cran plus loin. Elle va au-delà de la dévalorisation maximum du choix alternatif, elle vous dévalorise vous-même. D’abord, refuser une solution qui est la seule solution, c’est nécessairement une idiotie, vous n’êtes pas un idiot, faites le bon choix. Ensuite, quand bien même vous seriez un idiot qui s’ignore, vous porteriez une responsabilité sociale de votre idiotie. Car vous êtes une partie indispensable de la solution : le conseil scientifique du 6 mai qui défend le pass sanitaire cite à trois reprises le mot « empowerment », autrement dit l’adhésion active. Le pass sanitaire « peut s’inscrire dans une démarche citoyenne de renforcement des capacités et du pouvoir d’agir des individus (empowerment) face à l’épidémie [..] ». Si vous êtes contre la vaccination et contre le pass sanitaire, vous êtes de facto contre la solution collective dont chacun est l’auteur individuel, vous êtes contre un outil dont l’utilisation est fondé sur l’adhésion, en résumé vous êtes un ennemi de la société.
Il n’y avait pas besoin que le ministère des armées engage une « red team » Nous pouvons d’ores et déjà donner la solution que le gouvernement peut préparer quels que soient les scénarios que va imaginer cette équipe rouge, sans même avoir besoin de les connaitre. Que ce soit une invasion d’extra-terrestres ou une révolte des robots ménagers devenus des tueurs d’enfants, ou un effroyable covid-25, la solution magique aura toujours trois branches : technologie, médias, police. Pour un esprit humain qui demeure dans la lumière, pour aujourd’hui et pour demain, la seule solution, c’est la négation.
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